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Une communication "mal faite"

Même s’il n’est pas spécialiste de la vaccination, le professeur Jean-François Bergmann a remarqué une mauvaise qualité de l’information autour des vaccins. Selon lui, cela a participé à la constitution des ligues et des associations luttant contre la vaccination. Un phénomène qui l’inquiète, et qu'il caractérise comme « complètement a-scientifique ». Jean-François Bergmann admet que la communication des ligues anti-vaccins marche mieux que celle des agences de santé. Une situation qui inquiète les professionnels de santé avec pour crainte une baisse notable des personnes vaccinées. C’est pourquoi, en France, le corps médicale milite pour maintenir l’obligation de vaccination.

Comme le médecin le souligne, le vaccin est un médicament très particulier puisqu’il consiste à introduire un agent extérieur dans un organisme vivant et sain afin qu’il développe une réaction immunitaire positive contre une maladie infectieuse. C’est la symbolique de prévenir (et guérir) le mal par le mal. C’est pourquoi, Jean-François Bergmann suggère d’exploiter cette forte symbolique du vaccin dans la communication qui en est faite « Plutôt que de communiquer "Faites-vous vacciner, c’est bon pour la santé" ou "Les antibiotiques c’est pas automatique", je pense qu’il faut remonter d’un cran et essayer d’aller dans cette symbolique du mal par le mal. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour le médecin, la vaccination n’est pas un acte médical anodin. Il compare même l’acte vaccinal au fait de « jouer les apprentis sorciers ». Selon lui, le travail de communication doit se faire précisement sur cette image de professionnels inexpérimentés.  Pour étayer ces propos, il cite l’exemple du service de médecine qu’il dirige à l’hôpital Lariboisière : seul 20% de son personnel acceptent de se faire vacciner contre la grippe saisonnière. Pour lui, « c’est un échec cuisant ». Preuve qu’il y a « une symbolique à détruire ».

 

Le rôle des médias dans cette mauvaise communication

 

Les médias ont tendance à faire les gros titres sur des cas sensibles ou des complications dûes à une vaccination, dans le but de susciter une polémique. Pour Jean-François Bergmann, ceci a un côté « bling bling » qui le choque. Il pointe le côté « obscène » et « voyeur » des médias, tout en admettant que « c’est leur métier ». Le journaliste spécialiste des questions de santé Jean-Yves Nau temporise ce point de vue : « Je ne pense pas qu’il y ait une volonté délibérée des médias d’aller vers la polémique, surtout en matière de santé ».

Bergmann, lui reconnait que la communication traditionelle n’est « pas très vendeuse » pour les médias. Mais il aimerait tout de même bien qu' « ils reviennent à des choses plus raisonnables et donc moins vendeuses plutôt que de faire dans la symbolique du malade qui crient sur tout les toits qu’on l’a obligé à se faire vacciner ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le journaliste Jean-Yves Nau reconnait volontiers que « le simple fait de se présenter en victime est un bon format pour passer dans les médias ». Ce qui amplifie ensuite le phénomène puisque « l’emballement médiatique fait qu’à un moment donné il y a une chose » qui cristallise l’attention des médias, de l’aveu même du journaliste. Le médecin estime que les « médias se gargarisent » de la mauvaise communication faite par les experts et les scientifiques. 

 

Des médecins peu convaincus par les vaccins

 

Les médecins censés vanter les mérites des vaccins à leurs patients ont aussi leur part de responsabilité dans l’échec de la communication faite autour des vaccins. Jean-François Bergmann constate que les généralistes ne mettent pas toute leur conviction scientifique dans l’information qu’ils donnent à leurs patients. De plus certains confient à leurs patients ne pas être vaccinés eux-mêmes, notamment contre la grippe saisonnière. Selon lui, « le médecin est un vecteur d’éducation sanitaire » et s’ils ne sont pas eux-mêmes convaincus de l’intérêt de la vaccination, « c’est tout le système qui s’écroule ».

 

La défiance envers les industries pharmaceutiques fabricantes de vaccins

 

Dans ce système de communication, l’industrie pharmaceutique est considérée comme « un agent perturbateur ». Accusée de « faire de la publicité pour ses produits » et « taxée de tricheries et de mensonges », il estime qu'elle sera toujours mise en doute. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le journaliste Jean-Yves Nau analyse le cas du vaccin Gardasil (contre le papillomavirus). Ce qui devait initialement être une incitation à la vaccination est rapidement devenue une campagne publicitaire. C’est pourquoi, Jean-François Bergmann en conclut qu’il faut une « reprise de l’ensemble du système » de communication autour des médicaments avec « une égalisation, une normalisation, une simplification et un éclaircissement ». 

 

 

 

Laura Bruneau

 

 

 

 

 

 

 

"L'information sur les médicaments est mal faite ", selon Jean-François Bergmann, chef du service de médecine interne à l'hôpital parisien Lariboisière. Ancien vice-président de la commission de mise sur le marché du médicament, ce professionnel de santé dénonce une mauvaise communication de la part des autorités médicales avec pour principales victimes la médecine et plus spécifiquement les vaccins.

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