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La France est l’un des rares pays en Europe où l’obligation vaccinale est importante. Des articles du code de la santé publique rendent obligatoires les vaccins contre le tétanos, la poliomyélite (DTP) et la diphtérie. Certains professionnels, exposés à un risque de contamination ( notamment les personnels des établissements de santé) ont l'obligation d'être vaccinés. En cas de non-respect de la loi, des sanctions sont prévues (amendes, refus d’inscription en collectivité…) sauf si des contre-indications médicales sont reconnues.

Cette obligation vaccinale provoque un vif débat. Les associations critiquent l’inefficacité des vaccins et essayent de prouver leur dangerosité. Entre la parole des associations et des victimes, face à celle des laboratoires et des médecins, la Justice a souvent dû trancher, comme en témoignent les nombreux procès à ce sujet.

 

Les premières plaintes devant les tribunaux

 

Suite à la campagne de vaccination contre l’hépatite B lancée par le gouvernement dans les années 90, les premières plaintes contre le vaccin apparaissent. Les injections de ce vaccin provoqueraient des poussées de sclérose en plaques. Le tribunal de grande instance de Nanterre en 1998, doit juger le cas de deux personnes se disant victimes du vaccin. C’est au bout de quelques semaines après les injections, que celles-ci auraient déclaré les premiers symptômes de sclérose en plaques. Dans cette affaire, le laboratoire SmithKline, est mis en cause. Les juges décident le 9 juin 1998, que ce dernier doit indemniser les victimes. L’affaire marque le public, et fait les gros titres des journaux. « Le tribunal reconnaît la responsabilité du vaccin anti hépatite B dans la sclérose en plaques », publie ce jour-là le journal Le Monde. Libération consacre aussi un article à ce sujet : « Hépatite B. La justice accuse le vaccin. Mais pour la médecine, sa dangerosité n’est pas prouvée ». Les deux titres de ces articles résument la complexité de la situation. Le vaccin est jugé responsable, alors même que les médecins n’ont pas prouvé un lien avec les poussées de sclérose en plaques.

 

Les difficultés de rendre un jugement

 

Yves Garcin, ancien président du tribunal de grande instance de Nanterre lors du procès contre le vaccin de l'hépatite B, explique la décision rendue en faveur des victimes en 1998 : « Ce qui est apparu au tribunal à l’issue de l’étude des éléments du dossier, c’est que certes, le vaccin par lui-même ne provoquait pas la sclérose en plaques mais que l’action du vaccin était susceptible soit de provoquer une poussée de sclérose en plaques chez une personne prédisposée génétiquement à cette maladie, soit d’accélérer une poussée de sclérose en plaques chez une personne ayant déjà en elle les germes de la sclérose ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cet exemple, montre les problèmes que rencontrent les juges, lorsqu’il s’agit de trancher entre la parole des victimes et la parole scientifique. Mais pour Yves Garcin, pas question de laisser une personne sans indemnisation, au prétexte que la science a des doutes, ou que l’ensemble de la population vaccinée a subi peu de dommages. Il faut traiter les affaires au cas par cas, car de toute façon, la possibilité d’une totale adéquation entre vérité scientifique et vérité juridique est trop faible.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’évolution de la Justice dans la controverse

 

Suite aux procès de 1998 et 2000, d’autres plaintes sont déposées contre le vaccin de l'hépatite B. Et là encore, celles-ci montrent que les juges doivent les traiter chacune de manière distincte tant les éléments du dossier peuvent les complexifier. En novembre 2002, les juges vont d’ailleurs plus loin. Cette fois-ci, ils estiment et reconnaissent la responsabilité « entière » de l’Etat après une sclérose en plaques chez une femme qui avait été obligée de se vacciner contre l’hépatite B. 30 000 euros sont versés à Mireille Molard, comme le rapporte le journal Les Echos. À contrario, en 2004, le tribunal de grande instance de Paris déboute trois malades. Pour l’un d'eux, le tribunal estime qu’il n’a pas suffisamment démontré qu’il avait bien reçu la troisième dose. Quant aux deux autres : « qu’il ne peut être conclu de façon certaine à l’existence d’une relation causale entre la vaccination et la sclérose en plaques » même si le tribunal reconnaît que « l’hypothèse qu’il entraîne une augmentation faible du risque ne peut être exclue. »

 

Face à ce genre d’affaires, l’exercice de la justice a finalement évolué : « Le raisonnement s’est aujourd’hui affiné par un meilleur encadrement et des décisions plus précises » explique Yves Garcin. Le Conseil d'État estime « qu'en présence d'un doute scientifique, (quand la vaccination a eu lieu deux ou trois mois avant l'apparition des premiers symptômes) cela suffit pour indemniser le malade dans le cas d'une vaccination obligatoire », détaille-t-il dans Le Nouvel Observateur. Un pas de plus en faveur du lien de causalité pour le Conseil d’État. Pour autant, « le nombre de personnes qui a obtenu gain de cause reste limité, alors qu’un grand nombre de plaignants n’a pas pu être indemnisé compte tenu des éléments de leur dossier », ajoute Yves Garcin.

 

Un discrédit jeté sur les médecins et les laboratoires ?

 

Ces procès contre le vaccin de l’hépatite B ont été très médiatisés à l’époque, alimentant une peur de la vaccination, et favorisant la naissance d’associations anti-vaccination comme REVAHB, qui estime que 2600 personnes devraient être indemnisées. Un rejet des vaccins que regrettent les médecins et les laboratoires. Le vaccin Gardasil, lui aussi mis en cause, a fait réagir le laboratoire Sanofi Pasteur MSD qui « regrette que les conclusions formulées par les experts de la commission (CRCI, conciliation des accidents médicaux de Bordeaux) qui ne sont fondées sur aucune preuve scientifique, jettent le discrédit sur le vaccin Gardasil ». L’Académie nationale de médecine déplore aussi « les allégations non justifiées » sur ce vaccin. En 2009 d’ailleurs, un plan national de lutte contre les hépatites B et C est annoncé, pour ramener la confiance dans la vaccination. Pour Yves Garcin, les laboratoires doivent tout de même reconnaître leur responsabilité et admettre leurs erreurs : « Le monde médical a dû mal à devoir répondre de ses activités devant la justice. Il me semble qu’aux vues des énormes avancées que la science a permis pour la santé, il peut y avoir chez certains, un refus d’admettre qu’ils sont faillibles ». Pour lui d’ailleurs, une décision de justice liée à un accident vaccinal est positive, car elle peut « permettre aux sociétés mises en cause, d’admettre le bien-fondé des premières décisions et les inciter à trouver des solutions sans aller jusqu’au procès ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La polémique relancée par de nouvelles plaintes contre les vaccins

 

La controverse, malgré les campagnes de vaccination, va être relancée par les nouveaux vaccins mis sur le marché comme le vaccin contre la grippe H1N1 en 2009. 5,7 millions de Français se sont fait vacciner. Des cas de narcolepsie chez une soixantaine de personnes seraient liés au vaccin selon des chercheurs. L'État a dû débourser 48 000 euros pour dédommager six victimes du vaccin contre le virus H1N1, selon l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux.

En 2006 le Gardasil apparaît sur le marché français afin de prévenir des cas de cancers du col de l’utérus. Là encore, des plaintes ont été déposées. En effet, sur les 5 millions de doses distribuées en France, 435 cas d’effets secondaires graves ont été signalés selon l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM). C’est la jeune Marie-Océane Bourguigon atteinte d‘une sclérose en plaques, qui portera la première plainte contre Sanofi en 2013. Là encore, l'affaire n'est pas simple : les deux experts qui se sont prononcés n’ont pas réussi à se mettre d’accord dans leur rapport.

 

 

Elise Saint-Jullian 

 

Vaccins et effets secondaires :

quand les juges doivent trancher

Depuis les années 1990, les plaintes contre les vaccins se sont accumulées en France. Les patients souhaitent passer devant la justice pour faire reconnaître le lien de causalité qui existe entre l'apparition d'effets secondaires graves et l'injection vaccinale. Mais comment trancher lorsque ce lien n'est pas démontré par la science ? C'est là tout le travail de la justice qui doit trancher au cas par cas. 

Le monde médical a du mal à devoir répondre de ses activités devant la justice

Pas question de laisser une personne sans indemnisation

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